Kubrick président!

Tant qu'à voter (ou pas...) pour quelqu'un qui ne respectera pas le dixième de son programme, surtout s'il n'est pas élu, autant se décider en fonction des films préférés des candidats. Personnellement, je vote... Cheminade. C'est la conclusion à laquelle je suis arrivé en découvrant le top cinq filmique des dix aspirants présidents, sur le site allocine.fr. Exercice certes difficile mais presque tous ont joué le jeu, pour des résultats diversement attendus.

D'abord, la super-classe, c'est Cheminade : éclectique, cinéphile mais pas frimeur, il envoie, y a pas à dire. Ford (L'Homme qui tua Liberty Valance, qu'on peut considérer comme son meilleur western sans trop de complaisance), Kurosawa, Renoir, Siegel pour son excellente Invasion des profanateurs de sépultures, et last but not least le dernier Herzog, sur la grotte Chauvet. N'en jetez plus !

Deuxième prix, loin devant le reste du peloton, pour Mélenchon, qui perd quand même des points avec Out of Africa mais en marque pas mal avec Fellini Roma, Blade Runner, Apocalypse Now et, après tout pourquoi pas, Little Big Man.

Je décerne le prix de la liste archi-prévisible, à égalité, à Le Pen et Poutou : la première doit apprécier le côté terroir de  Manon des Sources et Braveheart (pas le même terroir, certes, et on notera au passage que ça n'est pas rien de réussir à glisser Mel Gibson dans un top-5), ainsi que la finesse infinie du Père-Noël est une ordure ; le second pense au grand soir (ou pas) en regardant Les Temps modernes, Ressources humaines et, surtout, Land and Freedom (j'ai pas dit mauvais, j'ai dit prévisible).

Prix de la frime pour Sarkozy, qui non seulement refuse de jouer le jeu mais nous balance à la figure Dreyer, Rossellini, Visconti, Lubitsch (mais que les muets, hein, attention), Capra... Moi aussi j'peux l'faire, d'abord : quand j'étais petit j'ai vu des films d'Abel Gance, Chris Marker, D.W.Griffith, Max Ophüls, Maurice (et Jacques) Tourneur... Alors, pas mal hein ?

Reste Joly et Arthaud, qui ne jugent manifestement pas les films sur leur esthétique mais sur leur message (même si Chicken Run dans un top-5, ça le fait), et Hollande et Bayrou qui se livrent à un concours de consensus mou. Le second l'emporte brillamment et rafle le prix du cinéphile plan-plan avec le quinté gagnant To Be or not to Be (passe encore), Les Tontons flingueurs (pareil), La Mélodie du bonheur (passe moins), La Fille du puisatier (passe plus trop) et... Pretty Woman (argh, passe plus du tout).

J'oubliais Dupont-Aignan, qui joue encore moins le jeu que le président sortant, puisqu'il a consacré l'essentiel de sa vie cinéphilique à se coltiner tout Bertrand Tavernier et tout Woody Allen. C'est pas rien, chapeau...

Et pour qui votent les candidats, au fait ? Pour Kubrick, en tête de justesse. Le réalisateur nord-américain est présent en gros chez Sarkozy ("Lolita est un chef-d'oeuvre intemporel [...] alors que l'esthétique et le propos d'Orange Mécanique me semblent avoir beaucoup vieilli", je vous laisse méditer longuement cette phrase) et à la découpe chez Poutou et Hollande. Suivent de près Ridley Scott, Coppola et Visconti, ce qui nous fait à l'arrivée pas mal d'absents de marque (cf. ma liste ci-dessus, hé hé).

Bruno Icher et Gérard Lefort, de Libé, rappellent à notre président, car ils sont bons princes, que Peter Sellers n'apparaît que dans une scène de Lolita, ce qui reste un peu maigre pour "un de ses rôles les plus bouleversants". Ils arrivent sinon à la même conclusion que moi : à fond derrière Cheminade, "ce qui ne veut pas dire qu'on ne fera pas fusée à part". C'est aussi bien de le préciser.

Mise à jour du 19/4 : A.Ferenczi parle aussi de la chose ici et vote pareil. Mais l'un de ses lecteurs pose la bonne question que tout le monde semble avoir oubliée, c'est un comble : est-ce que Cheminade a vu Mars Attacks ?!

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